La Boutique Solidaire de la Plaine des Cafres
La crise sanitaire a réduit la fréquentation, mais la boutique Fripes de la Plaine des Cafres - à l'heure actuelle la seule boutique solidaire située dans les Hauts et en zone rurale - continue d'ouvrir ses portes le mercredi après-midi et le samedi matin. Pimpante et bien fournie, la boutique propose vêtements, chaussures, bijoux, bibelots et autres objets que l'on vend à 0,50€, 1€, 2€ - un prix symbolique qui est fixé non pas pour " faire du chiffre " mais parce qu'acheter permet de conserver sa dignité.
Juste à côté, le local dédié au tri des dons est en travaux : on va y aménager un " vrai " espace d'accueil. Entre la boutique, le tri et l'accueil, l'équipe composée d'une dizaine de bénévoles tend une main fraternelle à cette population qui vit plutôt isolée du reste de l'île.
Ce samedi matin, Méry, Gilberte, Geneviève et Thérèse reçoivent les visiteurs à la boutique, tandis que Josiane, Lisette et Georgette s'occupent du tri. « On s'organise comme on peut, en fonction des possibilités », explique Méry. Cette originaire de Saint-Paul est montée s'installer à La Plaine des Cafres quand l'heure de la retraite a sonné, et « pour rien au monde » elle ne redescendrait vivre dans les Bas. Avec Gilberte, c'est elle qui a relancé en 2009 l'activité du Secours Catholique à la paroisse. « Le Père m'a dit : tu as fini avec le scoutisme, je t'embauche ! » raconte Méry. Alors elle est venue.
Quant à Gilberte, bien avant de partir à la retraite, elle avait déjà l'idée de s'engager. « En travaillant à la poste, j'étais en première ligne, dit-elle. Au guichet, les gens se confient ». L'inauguration de la boutique, dans un local entièrement rénové, a eu lieu en décembre 2013. Depuis, ces deux bénévoles - que Geneviève, la trésorière, qualifie de " personnes exemplaires " - tiennent la boutique, tout en essayant de « faire plaisir aux gens ». C'est leur façon de répondre à ce qu'elles perçoivent comme un appel de Dieu.
Toutes deux soulignent le contexte particulier de La Plaine des Cafres. D'une part, il y a la pudeur des habitants: « Ils ont leur dignité, ils ne viennent que s'ils sont vraiment dans le besoin », précise Gilberte. D'autre part, il y a le froid. « Les familles ont besoin de lait, de viande, de couvertures, poursuit-elle. Les besoins ne sont pas les mêmes que dans les Bas. Ici, en zone agricole, il y a toujours un voisin qui a des brèdes, etc., mais les gens ont besoin de denrées non-périssables. » Du coup, on organise à l'église des collectes de denrées qui sont redistribuées périodiquement à la boutique.
Le groupe travaille en lien avec une association municipale de réinsertion qui recycle tout ce qui ne peut pas être vendu ou donné. Avant, c'était avec une association de Saint-Paul, mais désormais : « on privilégie le travail avec les gens d'ici. » Les bénévoles constatent que le chômage ne cesse d'augmenter, notamment parmi les gens qui arrivent des Bas. « Ils montent s'installer ici à cause de la spéculation foncière et les loyers qui flambent mais ils ne se rendent pas compte du changement - on s'y habitue mais ici il faut se chauffer ! » s'exclame Méry.
Si la Covid a mis fin à des activités telles que le repas de Noël ou les sorties avec les familles, Gilberte et Méry apprécient le fait de se retrouver à la boutique, de bavarder ensemble et passer un moment convivial. Et même si elles aimeraient un jour passer la main, elles continueront, tant que la relève n'est pas assurée, à accueillir les démunis dans cet espace où la fraîcheur extérieure est compensée par une vraie chaleur humaine.